13/02/2013

Où l'on a le droit de s'évader...

n. m. Dérivation de l'esprit permettant de se mettre en retrait de réalités déplaisantes, à travers la distraction ou le fantasme.

To our dear English speaking readers, I must admit to have found most of my inspiration on Wikipedia, if I may kindly refer you there. The French version was unfortunately not up to par (and by a long shot!), hence the necessity of a specific post.

Cher lecteur, chère lectrice,

En vous écrivant la semaine dernière, j'ai réalisé que beaucoup d'entre vous ne connaissez peut-être pas un concept que je trouve essentiel, et qui va probablement beaucoup contribuer à faire vivre ce blog
L'ESCAPISM (prononcez "eskèypiseum" - ou escapisme si vous préférez, après tout vous êtes libres).

Je m'excuse par avance de cet anglicisme : je n'en ai trouvé aucune traduction satisfaisante en Français - évasion est loin de couvrir toute l'idée - donc je ne vais pas le traduire.  
C'est un mot que j'utilise souvent avec des amies lectrices, peut-être à la légère ? (Si c'est cette partie là qui vous intéresse, sautez les prochains paragraphes, ça devient un peu dense, je ne vous en voudrai pas. Je vous retrouve à la prochaine photo.)

"Escapism" est un mot anglais créé au début des années 1930, un concept qui semble avoir fait à l'époque l'objet de grands débats, mais qui ne fait pas du tout partie du vocabulaire (ni de la culture ?) français. 

Bon mais alors qu'est-ce que c'est en vrai ? Le mot a d'abord une connotation plutôt négative : c'est une façon d'échapper à une réalité désagréable en se réfugiant dans une activité particulière. Là vous n'avez que l'embarras du choix : nourriture, art, jeux vidéos, lecture, télévision, musique, mais aussi drogues, pronographie etc. N'importe quelle activité de la vie courante peut convenir. Pour certains, même, la religion est une forme extrême d'escapism, comme Karl Marx quand il la qualifie d'"opium du peuple".

Si on peut facilement comprendre pourquoi l'escapism est vu comme une tendance négative, une fuite malsaine de la réalité, voire carrément une déviance ou une forme d'oppression (comme dans "Farenheit 451" de Ray Bradbury), il a quand même eu ses défenseurs, et notamment un de nos grands chouchous : J. R. R. Tolkien. Au moment même des débats académiques sur le concept, Tolkien écrivait, dans un de ses essais, que "l'escapism comprend un élément d'émancipation dans sa tentative de s'imaginer une réalité alternative". D'autres, comme le philosophe allemand Ernst Bloch, ont émis l'idée que, ce qui est considéré comme un "rêve éveillé" dans une société dominée par le rationnalisme et la technologie, peut en fait permettre de faire germer les fondations d'un ordre nouveau et d'une société plus humaine. Il en parle comme d'un "immature, mais honnête, substitut à la révolution".

Et si je suis bien sûr convaincue que tout excès est néfaste, surtout dans ce domaine là, je pense qu'un peu d'escapism est toujours salutaire.
A y bien réfléchir, les idées les plus neuves et les plus extraordinaires, n'interviennent-elles pas lorsque l'esprit a le temps de partir à la dérive, de s'évader de considérations quotidiennes et répétitives pour explorer de nouvelles ressources ? Comment inventer du nouveau si l'on ne peut s'échapper de l'existant ? Comment améliorer la réalité, la société, n'importe quel système, si l'on n'a pas pu d'abord en imaginer un meilleur ? 

Ajourd'hui, je vais vivre dans l'instant.
Sauf si l'instant est déplaisant,
auquel cas je mangerai un cookie.
Pour en revenir à notre usage un peu "léger" (ou pas ?) du mot escapism, on s'en sert en fait pour décrire des activités qui nous sortent de la réalité grisâtre du métro-boulot-dodo mais aussi parfois qui nous permettent d'échapper à un cerveau en sur-régime qui ne nous laisse aucun répit. Levez le doigt si ça ne vous évoque rien... Je me disais bien... Mon grand-père a une image assez parlante pour ce phénomène : celle d'un petit vélo qui nous tourne dans la tête sans jamais s'arrêter. Vous savez, celui qui commence sa course au moment où vous posez avec une délicieuse anticipation la tête sur l'oreiller et qui vous empêche de dormir, le fourbe !

Quel est le lien avec ce blog me direz-vous ? La lecture ! La lecture qui permet tour à tour de tout oublier y compris ses pensées, mais aussi d'élargir nos horizons, de découvrir le monde et les autres, d'apprendre, de comprendre et d'échanger. De se remettre en question, d'avoir envie de plus, de mieux, d'avancer. 

Gardez votre calme
et
évadez-vous
dans des romans
Lecture que j'adore à bien des titres mais surtout comme mon vaisseau idéal pour une pratique saine et épanouie de l'escapism (on dirait une pub pour un club de gym). Combiné à la (si légère) tendance compulsive dont je vous parlais la semaine dernière, ça devrait nous donner de la matière pour faire vivre ce blog pendant un bout de temps !

Alors ne jetez pas la pierre aux adeptes de l'escapism, surtout sous des formes aussi anodines que la lecture ou la cuisine, mais offrez, vous aussi, de temps en temps, une bouffée d'oxygène à votre esprit surmené. Qui sait, c'est peut-être là que vous viendra l'inspiration qui manquait pour améliorer votre réalité. Trouvez votre vaisseau et apprivoisez le...

A bientôt,

Min'


PS : Comme pour toutes les bonnes choses, pensez à consommer avec Modération (ou sa cousine Tempérence elle est sympa aussi). 

PPS : Quel est votre forme d'escapism favorite ?

PPPS : Il est un peu long ce post non ?
 

2 commentaires:

  1. Moi j'aime beaucoup le concept, il manque d'ailleurs ma cication favorite! ;)
    Puis bon, pour la forme preferee, j'hesite entre creation et lecture, mais ca se vaut je dirais... Super post!

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    1. Merci ! Moi je dis pas la peine de choisir entre création et lecture, plonge dans les deux ;)
      Ah, c'est inadmettable comme manquement, tu veux bien partager ta citation favorite avec nous ?

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